IVG aux USA

21nov23h0023h15IVG aux USA23h00 - 23h15 AnimateurCastelnau ClaudineÉmissionActualité religieuse dans les médias

Résumé de l'émission

La Cour suprême américaine avait voté en juin dernier que désormais c’est aux 50 États américains à décider du droit à l’IVG, dans leur État. Mais contrairement à la Cour suprême qui a jugé l’arrêt Roe vs Wade « totalement infondé dès le début » (pour noyer son chien, on dit qu’il a la gale…), d’autres juristes, étrangers à l’idéologie conservatrice de la majorité des juges de la Cour suprême, affirment que l’arrêt Roe vs Wade était bien fondé sur le 4e amendement de la Constitution de 1791, qui instaure une protection de la vie privée.  Ainsi l’arrêt Roe vs Wade était-il parfaitement bien fondé, affirme Nicole Bacharan, spécialiste de l’Amérique, contrairement aux arguments développés par la Cour suprême : « Des arguments vieux comme le mouvement anti-avortement, dit-elle, pour démontrer que l’IVG n’est pas une question intime et relevant de la vie privée. A commencer par les documents fournis depuis des décennies par les juristes pro-vie pour démonter les fondements juridiques de Roe vs Wade et prouver qu’aucun élément de la Constitution ne permet de conclure à une autorisation de l’avortement. Évidemment, l’avortement n’est pas mentionné dans la Constitution de 1789 ! » Et l’on peut constater que la décision de la Cour suprême a provoqué immédiatement des manifestations pour ou contre, révélant la dimension politique d’une question intime (l’avortement) devenue enjeu électoral.  Le site tv5monde relève que les Américains sont majoritairement – jusqu’à 70 % – pour l’arrêté Roe vs Wade et opposés à la décision de la Cour suprême de l’annuler. Nicole Bacharan affirmait même que depuis 1973, « il y a toujours eu environ 60 % de la société américaine pour vouloir maintenir Roe vs Wade. Aujourd’hui, 54 % des Américains ne veulent rien changer à la loi ; 28 % demandent son annulation et 18 % ne seraient pas contre de revenir sur les délais légaux d’une IVG. Ceux-ci sont définis en fonction de la viabilité du fœtus qui, dans les années 1970, se situait à environ 27 semaines, ramenées, avec les progrès de la médecine, à environ 22 semaines d’aménorrhée aujourd’hui. » Dès l’annonce officielle de l’annulation de la loi, sept États comme le Wisconsin ont déclaré l’avortement illégal sur leur territoire et une jeune assistante parlementaire du Wisconsin se déclarait « en état de choc » et constatait que « rendre l’avortement illégal ne va pas y mettre fin mais le rendre plus dangereux [parce que pratiqué dans la clandestinité.] Et parmi les manifestants, une jeune femme tenait une petite pancarte avec un dessin d’un cintre ensanglanté [utilisé pour les avortements clandestins]. Et ce sont les femmes les plus pauvres, souvent les femmes noires, vivant dans des États conservateurs, qui seront les premières touchées par le recul du droit à l’avortement. « La vie de millions de femmes va devenir extrêmement précaire et difficile, insiste Nicole Bacharan. Et l’on sait quels effets a l’impossibilité d’avoir recours à l’avortement : celles qui ne peuvent pas voyager auront un enfant contre leur gré et chercheront à le faire adopter, ou encore elles auront recours aux méthodes de grand-mère pour interrompre leur grossesse. Parce que les femmes qui ont besoin d’avorter l’ont toujours fait, avec tous les risques pour la santé que cela comporte. Elles essaieront aussi de se procurer des pilules abortives qui, dans certains États, vont être interdites à la vente. Alors elles les feront venir du Mexique, par exemple. » Avec tous les risques inhérents à un commerce clandestin et à des produits non contrôlés. Et pendant ce temps les anti-avortement pavoisaient et la droite conservatrice américaine saluait « une seconde chance pour la vie », s’est réjouit Mike Pence, l’ancien vice-président et fidèle de Donald Trump.

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Cette affaire autour du droit à l’avortement a montré que rien ne protège plus en fait ce droit dans la Constitution et qu’il revient aux États de légiférer sur leur sol, ce que certains se sont empressés de faire depuis en interdisant l’avortement ! Il faudra ensuite des majorités solides dans chaque État pour sauver le droit à l’avortement localement. Est-ce un signe de cette réaction pour préserver ce droit en Géorgie ? Un juge de la Cour supérieure de cet État vient de  déclarer que la loi interdisant les avortements après qu’une activité cardiaque ait été décelée chez le fœtus à 6 semaines de grossesse « violait la liberté et le droit à la vie privée des femmes enceintes, en vertu de la constitution de la Géorgie. » Et de la Constitution américaine puisque Roe vs Wade était encore la loi du pays en 2019, lorsque la Géorgie avait restreint le droit à avorter. L’accès à l’avortement en Géorgie est donc de nouveau possible jusqu’à 22 semaines de grossesse, comme avant l’interdiction. Et aux élections de mi-mandat qui viennent de se tenir, les électeurs ont voté au moins dans 4 États pour protéger l’accès à l’avortement. C’est ainsi que dans l’État du Kentucky conservateur où l’interdiction de l’avortement avait été promulguée dès la décision de la Cour suprême, un amendement confirmant cette interdiction a été rejeté par les électeurs et permet de rétablir l’accès à l’avortement. Comme au Kansas. Dans le Michigan, les électeurs ont ratifié une proposition de loi qui permet d’inscrire le droit à l’avortement dans la constitution de cet État. En Caroline du Nord, les républicains qui voulaient interdire l’avortement ont perdu. Un sondage à la sortie des urnes montre aussi que presque 3 électeurs sur 10 ont déclaré que l’avortement était le sujet le plus important dans leur vote et que 4 électeurs sur 10 ont déclaré être « furieux » que Roe vs Wade ait été abrogée.

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D’autres ont jubilé lorsque la décision de la Cour suprême de révoquer l’arrêt Roe vs Wade a été connue de même que la décision de la Cour suprême en faveur du port d’armes. Par exemple, les fidèles blancs évangéliques d’une église de Houston au Texas. Le pasteur est aussi un élu républicain et il se vante d’être à la tête du comté le plus conservateur du Texas. Aux États-Unis, les évangéliques blancs sont favorables à 72 % à l’interdiction complète de l’avortement. De là à comparer l’avortement avec la Shoah… certains n’hésitent pas à franchir le pas. Quant à l’épiscopat catholique américain, il a applaudit à la décision de la Cour suprême : « Pendant près de 50 ans, l’Amérique a appliqué une loi injuste qui lui a permis de décider qui peut vivre et mourir », déclaration reprise sur vatican news, le site du Vatican. A contrario, la présidente de la Chambre des représentants, la démocrate Nancy Pelosi, a parlé de cette décision de la Cour suprême comme d’une « décision cruelle et scandaleuse, mettant en jeu le droit des femmes. » Il faut ajouter que Nancy Pelosi est catholique et que parce qu’elle soutient le droit à l’avortement, elle a été privée de sacrements par l’archevêque de Baltimore, par ailleurs militant pro-vie, qui écrit dans une note aux évêques « que le mouvement pro-vie reflète tout ce qui est bon dans notre démocratie américaine, et mérite d’être compté parmi les grands mouvements pour le changement social et les droits civils dans l’histoire de notre nation. »

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Le site evangeliques.info, https://www.evangeliques.info/2022/11/15/etats-unis-aux-elections-de-mi-mandat-la-majorite-des-croyants-ont-vote-pour-le-droit-a-lavortement/ un site évangélique protestant, a publié le 11 novembre un article sur le vote des Américains aux élections de mi-mandat.  On y retrouve ce sondage à la sortie des bureaux de vote qui a montré que le droit à l’avortement avait été la seconde motivation des citoyens américains pour se rendre aux urnes, juste après l’inflation. De même, les élections de plusieurs gouverneurs pro-choix (pour l’avortement) et les nombreux votes contre les mesures de restrictions pour l’accès à l’avortement montrent un paysage religieux très majoritairement pro-IVG. Parmi l’ensemble des électeurs américains qui se déclarent croyants, relève evangeliques.info, seuls les évangéliques (65%) et les mormons (54%) ont soutenu pour la plupart l’idée de rendre l’avortement illégal dans la Constitution de leur État, alors que les autres confessions s’y sont montrées bien plus favorables. » Ainsi, 57% de catholiques, les 2/3 des protestants non évangéliques (réformés, luthériens) aimeraient un avortement légal et simple d’accès. Les juifs (73 % et les hindous 77 % y sont encore plus favorables. Et 27 % des électeurs déclarent même que la remise en cause du droit à l’avortement par la Cour suprême est la motivation qui a « le plus pesé sur leur vote. »

 

 

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