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Russie, Ukraine et religion

08mar16h0016h15Russie, Ukraine et religion16h00 - 16h15(GMT+01:00) AnimateurCastelnau ClaudineÉmissionActualité religieuse dans les médias

Résumé de l'émission

Le magazine protestant évangélique francophone « Christianisme Aujourd’hui »  https://www.christianismeaujourdhui.info/2022/02/24/lin%ef%ac%82uence-du-patriarche-de-moscou-sur-la-geopolitique-russe/ a publié un long article le 1er mars sur l’Eglise orthodoxe russe : « Depuis la chute de l’URSS, souligne Christianisme aujourd’hui, l’orthodoxie est redevenue un élément essentiel de l’identité russe. Vladimir Poutine ne le sait que trop bien et s’appuie sur la religion tant pour définir sa politique intérieure que pour diriger sa diplomatie. Même si la Constitution russe assure que la Fédération [de Russie] est un État laïc. Cette relation n’est pas à sens unique : l’Église russe dispose également d’une influence importante sur […] le Kremlin. » On pourrait ajouter que le patriarche russe s’aligne sans état d’âme, sur la politique de Poutine. L’Ukraine a fait les frais de cette porosité entre religion, territoire et politique internationale, souligne encore Christianisme Aujourd’hui : « En 2019, Bartholomée Ier, le patriarche orthodoxe de Constantinople et primus inter pares de l’orthodoxie révoque un décret de 1686 qui plaçait les Eglises ukrainiennes sous l’autorité de l’Eglise autocéphale de Moscou et de ce fait accorde leur indépendance aux Eglises d’Ukraine qui ne souhaitaient pas être sous la coupe de Moscou. Cet événement a mené, en 2018, à la constitution d’une nouvelle Eglise autocéphale, dite de Kiev, approuvée par le président ukrainien de l’époque et à la fureur du patriarche orthodoxe de Moscou. Mais cette Eglise orthodoxe ukrainienne indépendante n’est pas reconnue par certaines des autres Eglises autocéphales, notamment par celle de Moscou. D’où un conflit territorial et un conflit spirituel. » Moscou se veut aussi le protecteur de tous les chrétiens au-delà du monde orthodoxe. Ainsi dans la Syrie de Bachar-el-Assad  où la Russie intervient soutenue par le patriarche orthodoxe russe Cyrille au prétexte qu’il faut défendre les chrétiens d’Orient contre les islamistes au pouvoir en Syrie… Et voilà la Russie devenue protectrice des chrétiens. De tous les chrétiens. Et l’Europe dénoncée comme oublieuse de ses racines chrétiennes au profit de valeurs progressistes dont « la propagation de l’homosexualité par certains Etats » selon Poutine.  « Ce soft power passe également par la construction de monuments, notamment une statue du Christ en Syrie en 2013. Mais en Europe également, Moscou entend afficher sa présence et son rayonnement spirituel. Par exemple, la très puissante société gazière nationale Gazprom a largement financé la cathédrale Saint-Sava en Serbie, ce qui permet à la Russie de montrer aux frères slaves et orthodoxes, candidats à l’entrée dans l’Union européenne, qu’ils peuvent davantage compter sur elle. L’Eglise russe a inauguré en 2016 la cathédrale Sainte-Trinité à Paris intégrée au centre culturel et spirituel orthodoxe, dont l’architecture évoque les styles byzantin et russe avec ses bulbes dorés… Un complexe de 170 millions d’euros financé par l’Etat russe […] Cependant il y a aussi un projet moral, pour ne pas dire religieux. » C’est ainsi que Vladimir Poutine s’affiche comme l’orthodoxe parfait avec sa participation active à des cérémonie orthodoxes largement retransmises tandis que sous couvert de contrer l’influence pernicieuse de l’Occident, et malgré une constitution qui garantit que la Fédération de Russie est un Etat laïc, les lois limitent de plus en plus la liberté du monde religieux non orthodoxe,  comme les communautés baptistes ou évangéliques. « Ainsi, conclut l’article de Christianisme aujourd’hui, derrière chaque prise de position de la Russie de Vladimir Poutine, il est légitime de se demander s’il y a un intérêt de la part de l’Eglise orthodoxe de Moscou et de considérer les conséquences pour les communautés qui ne partagent pas cette foi. »

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Depuis les indépendances autoproclamées de la République Populaire de Donetsk (dans l’est de l’Ukraine) et de celle de la République populaire de Lougansk en 2014, les Eglises protestantes, notamment évangéliques et baptistes, sont victimes de restrictions de la liberté religieuses et des églises sont fermées, accusées de violations des procédures d’enregistrement des organisations religieuses. Une situation déjà connue au temps de la Russie soviétique ! Il semble aussi que seuls les membres des associations religieuses pourraient participer aux cultes et aux activités de ces associations. L’invasion de l’Ukraine par la Russie pourrait donc entraîner la fermeture de nombreuses Eglises, notamment baptistes, sur les régions envahies par les Russes et le président de l’Institut baptiste ukrainien à Lviv dit s’attendre à ce que  « l’Eglise entre dans la clandestinité» comme au temps de l’Union soviétique. « L’Eglise n’a pas oublié ce que signifie être persécuté […]

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Condamnations, appels à la paix se multiplient dans le monde orthodoxe et contrastent singulièrement avec les déclarations du patriarche de Moscou qui encense Vladimir Poutine, qu’il loue comme étant « au service de son peuple ». S’adressant à l’armée, Kirill a ajouté que « les forces russes ont choisi la bonne voie. » Et en rappelant les liens séculaires qui ont uni les peuples ukrainien et russe depuis le baptême de la Russie [en 988] au temps de saint Vladimir, grand-prince de Kiev et personnage peu recommandable… le patriarche de Moscou dit espérer que les divisions s’apaiseront entre les deux peuples. Ce qui ne l’a pas empêché de qualifier les opposants de Moscou en Ukraine de « forces du mal », selon un communiqué de l’AFP : « Que Dieu nous préserve de ce que la situation politique actuelle en Ukraine, pays frère qui nous est proche, soit utilisée de manière à ce que les forces du mal l’emportent », a déclaré Kirill lors de son sermon dominical. Selon lui, les « forces du mal » sont ceux qui « combattent l’unité » de l’Eglise orthodoxe russe […] Or, l’Ukraine a depuis 2014 quitté la sphère d’influence russe pour se rapprocher de l’Union Européenne et de l’OTAN. » Et elle s’est aussi dotée en 2019 d’une Eglise orthodoxe indépendante du patriarcat de Moscou qui a mis fin à la tutelle religieuse russe et provoqué la colère du patriarche et de la Russie. « Nous ne devons pas permettre aux forces obscures extérieures et hostiles de se moquer de nous » a-t-il déclaré. Le patriarche orthodoxe russe n’hésite pas à soutenir Vladimir Poutine dans ses opérations de « maintien de la paix » (sic) et il n’a pas hésité, lors d’une homélie, à lancer un appel à l’unité de l’Eglise orthodoxe et à la préservation de « la terre russe » dont il a précisé que » la Russie, l’Ukraine, la Biélorussie et d’autres peuples font partie ». Et Kirill qualifie la présidence de Poutine, de « miracle de Dieu ». On se demande de quel Dieu ? Un spécialiste français de la Russie interrogé par l’hebdomadaire catholique La Vie ajoute que « Poutine ne comprend que le rapport de force. Se placer sur un plan spirituel avec lui n’aurait pas de sens. Le pardon, la miséricorde… C’est un langage dont il se moque ». 

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Le 6 mars, le quotidien Libération relevait que depuis le débuts de la guerre lancée par Poutine l’Eglise orthodoxe ukrainienne rattachée à Moscou marque ses distances vis-à-vis du patriarche russe Kirill. Le métropolite Onufriy, à la tête de cette Eglise ukrainienne rattachée à Moscou, a pris nettement position appelant Poutine à « cesser immédiatement cette guerre fratricide ». Libération écrit : « En Ukraine, l’offensive militaire russe occupe aussi et significativement le terrain religieux. Depuis le début de l’invasion déclenchée par Vladimir Poutine il y a neuf jours, les positions chavirent au sein de l’orthodoxie ukrainienne, première confession du pays, scindée entre deux entités jusqu’ici concurrentes et ennemies : l’Eglise autocéphale d’un côté, c’est-à-dire indépendante et nationale, et l’Eglise autonome de l’autre, subordonnée au patriarcat de Moscou. Les lignes bougent car cette dernière, en dépit de son attachement ancestral à la Russie, s’oppose pour la première fois de manière aussi ouverte au Kremlin […] L’ensemble des paradigmes géopolitiques et diplomatiques. Les paradigmes religieux vont être aussi profondément bouleversés», estime un théologien orthodoxe et historien des religions. Et Libération rappelle que près de 80 % de la population ukrainienne fait partie aujourd’hui de l’Eglise orthodoxe autocéphale qui a coupé les liens de la tutelle russe, mais que l’Eglise orthodoxe ukrainienne rattachée à Moscou affiche aujourd’hui ses distances avec le patriarche de Moscou par la voix de son métropolite Onufriy : « Une telle guerre ne trouve sa justification ni devant Dieu ni devant les hommes, a-t-il déclaré. au grand dam de Kirill soutien sans état d’âme de Poutine. L’héritage de sang et de larmes que cette guerre laissera à terme marquera, je pense, la fin de l’Eglise rattachée à la Russie prédit encore le théologien.

 

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