Des leviers pour décarboner

S’adapter au réchauffement climatique et se lancer pour de bon dans la planification écologique, c’est le sujet de la semaine. Lundi, Élisabeth Borne traçait la trajectoire de décarbonation de la France ; mercredi, ses ministres se voyaient remettre des feuilles de route pour l’accélérer dans les secteurs les plus émetteurs de gaz à effet de serre, autour de l’article 301 de la loi Climat et Résilience. Alors, la décarbonation, c’est pour bientôt ?

La ministre de la Transition écologique, Agnès Pannier-Runacher, qui était présente hier, l’a assumé : « La marche à franchir est haute, la décarbonation est un long processus ». Selon elle, produire plus de nucléaire et d’énergies responsables et consommer moins est absolument essentiel aux entreprises qui veulent rester compétitives…  Pour autant, il va falloir « faire beaucoup d’efforts pour atteindre les objectifs », a-t-elle rappelé. Rien que pour le nucléaire, il conviendrait de former 100 000 personnes, dont 60 000 sur des corps de métier précis, de tuyautier à soudeur.

C’était l’objectif de la soirée d’hier : présenter ces feuilles de route sectorielles, sur lesquelles ont travaillé les représentants des filières économiques, le Gouvernement et les collectivités territoriales. Au total, 500 personnes ont été impliquées… Et l’on peut dire que le travail a été productif : en tout, 25 leviers, soit 120 mesures, ont été proposés pour accélérer la décarbonation de l’aménagement, du bâtiment et du transport.

S’attaquer à l’empreinte carbone des véhicules

Le secteur des transports justement, qui représente encore 30% de la facture énergétique du pays. Clément Beaune, le ministre délégué aux Transports, s’est montré réaliste : « L’automobile et les véhicules lourds représentent encore 95% de nos déplacements sur le territoire ». C’est là que la feuille de route automobile s’est avérée utile, en identifiant les marges de progression. Il en est ressorti que l’empreinte carbone des véhicules provenait à 80% de l’usage, donc du carburant que l’on met dans la voiture, et à 20% de la phase de fabrication du véhicule. L’ambition est donc de passer à l’électrique, pour atteindre l’usage à 0 émission sur le flux en 2035 ; là encore, le ministre en a convenu : « Une vraie pente nous attend ». Les émissions c02 liés à l’automobile ont baissé de 50% en 30 ans, ce qui est encourageant… Mais le vrai objectif est d’ « atteindre les 0% en 2035 », a-t-il annoncé.

Pour les 20% d’émissions restant, le secteur compte sur l’énergie décarbonée à bas coût pour attirer les nouveaux investissements, sur les matériaux verts et l’écoconception, mais aussi sur le recyclage des matériaux notamment de batterie. Surtout, il faudra s’assurer du « bon déploiement des bornes de rechange sur le territoire », a rappelé Clément Beaune, ce qui suppose de « faciliter le pilotage de la recharge au niveau national », de « promouvoir la technologie » auprès des utilisateurs, mais aussi d’instaurer un « fonds spécifique » pour l’accélération du déploiement des bornes dans les gares et aéroports.

« La mobilité, c’est la bataille de l’opinion »

Quid des véhicules lourds ? Les camions, cars et autres engins de travaux publics ne seront pas non plus épargnés par la décarbonation. En plus de trouver un « mix énergétique qui réponde à la diversité des trajectoires », la feuille de route dédiée préconise de « renforcer les soutiens publics » pour accompagner financièrement ceux qui travaillent dans le transport routier.

Hier, on parlait aussi beaucoup de mobilité partagée, de covoiturage, ou encore d’intermodalité. Si ces pratiques semblent normalisées aujourd’hui, Christophe Béchu, le ministre de la Transition écologique, a prévenu : « Le plus dur lorsqu’on parle de mobilité, c’est l’immatériel, c’est la bataille de l’opinion ; il y a une résistance dans les usages qui évoluent très lentement ».

Pour compléter les efforts de mobilité, d’autres solutions ont été évoquées : territorialiser la trajectoire carbone, accélérer le recyclage urbain, ou encore végétaliser la ville, et donc planter des arbres. Car Agnès Pannier-Runacher l’a affirmé : « 80% de la ville de 2050 existe déjà. Il nous faut décarboner, et non pas reconstruire ».

par Chloé Boyer

Quitter la version mobile