Dans “Réparties”, Judith Housez reçoit la réalisatrice Danielle Thomson, et l’autrice Adélaïde de Clermont-Tonnerre pour un riche échange sur deux héroïnes indispensables à notre culture : Milady, une femme issue d’un roman, et la reine Margot, Marguerite de Navarre dans la réalité, devenue personnage de roman.
Milady et la Reine Margot peuplent notre imaginaire avec l’intensité de personnages réels. « Elle était belle, audacieuse, et le sort s’acharnait sur elle comme sur une coupable », écrit Alexandre Dumas à propos de Margot. Cette phrase s’applique également à Milady, à laquelle Adélaïde de Clermont-Tonnerre consacre son roman, imaginant les blancs laissés par Dumas. Au cinéma, en littérature, qu’est-ce qui guide l’attirance d’une autrice pour une héroïne du passé ? Serait-elle déjà profondément moderne ? Milady rivalise en audace, intelligence, et aptitudes physiques avec les héros masculins. C’est une femme politique.
Le film La Reine Margot, de Patrice Chéreau de 1994, co-écrit avec Danielle Thompson, a « révolutionné » le film en costumes. Ses accents de drame shakespearien l’affranchissaient du XIXe siècle. Revenons sur ses dialogues : contemporains, mais dotés d’un décalage d’époque.
Milday et la Margot sont deux femmes fatales, irrésistibles, au-delà de personnages de cape et d’épée. Incarnation de la femme maudite, Milady n’est-elle par un personnage mythique, presque mythologique, fille de Méduse ou Salomé ? Fatales aussi en ce que la fatalité s’acharne sur elles. Les noces de Margot avec Henri de Navarre se mêlent à la Saint-Barthélémy… Au cœur de leurs drames réside la question du pardon : comment l’aborder au XXIe siècle ? Lorsqu’elle s’empare d’une héroïne du passé, la fiction d’aujourd’hui doit-elle « dire justice » ?
Je voulais vivre, Adélaïde de Clermont-Tonnerre (Grasset, 475 pages)
La Reine Margot, un film de Patrice Chéreau
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