Olivier Mannoni s’explique avec le Mal absolu

Olivier Mannoni au Salon du livre en 2015. DR

Il y a déjà sept ans que le livre d’Adolf Hitler, Mein Kampf, (Mon Combat), est tombé dans le domaine public. De ce livre, nous avions d’anciennes traductions en français, très lissées, qui avaient considérablement amélioré le style propre de l’auteur. Au micro d’Emmanuel Taïeb, dans La valeur de l’homme, Olivier Mannoni, traducteur de Mein Kampf, explique comment, en équipe, il a pu venir à bout de ce travail difficile et éprouvant.

Car Mein Kampf n’est évidemment pas un livre comme les autres. C’est un ouvrage radioactif, maléfique, le programme du nazisme, un long bréviaire de la haine et un pamphlet politique – symptôme absolu du populisme antisémite qui sévissait en Allemagne dans les années 1920. S’il n’annonce pas explicitement la Shoah, car en 1924 elle n’a pas encore été planifiée, il en est le prodrome le plus hargneux et le plus obsessionnel.

Ce livre-là, plus que tout autre, appelait donc une nouvelle traduction, qui cette fois resterait au plus près de la langue chargée et illisible d’Adolf Hitler. Car le succès politique de ce livre ne doit rien à ses qualités littéraires, inexistantes, mais bien à sa capacité à faire passer des idées terribles par la simplification du langage. Pas question d’illusionner le lecteur en nettoyant le texte de ses erreurs et de ses lourdeurs. Il fallait le donner comme il avait été écrit au moment de sa parution. Il fallait restituer la grandiloquence pathétique d’un Hitler qui n’est encore qu’un peintre et un putschiste raté.

Ce livre-là, plus que tout autre, appelait aussi un appareil critique, un accompagnement, fait par des historiens professionnels, pour l’encadrer, l’expliquer et l’analyser. Pas question de laisser seul.

Cette entreprise de traduction a été menée par Olivier Mannoni, l’invité de l’émission La valeur de l’homme, au micro d’Emmanuel Taïeb. Elle a été supervisée par plus de vingt historiens, dont Florent Brayard ; et elle a été publiée sous le titre Historiciser le Mal, aux éditions Fayard. Mais on ne sort pas complètement indemne de la traduction d’un tel ouvrage ; on ne sort pas indemne de la fréquentation des racines du mal. En traduisant Mein Kampf pendant plusieurs années, Olivier Mannoni a fait œuvre d’historien, de linguiste et bien sûr de passeur d’une indispensable réflexion sur le nazisme et le totalitarisme.

Vous pouvez réécouter l’émission La Valeur de l’homme consacrée à Olivier Mannoni ci-dessous, et sur toutes les plateformes de podcast.

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