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La guerre en Ukraine

14mar13h0013h15La guerre en UkraineToute l'actualité religieuse dans les médias13h00 - 13h15(GMT+01:00) AnimateurCastelnau ClaudineÉmissionActualité religieuse dans les médias

Résumé de l'émission

La guerre en Ukraine… Chaque jour apporte son lot de déclarations, de rencontres au sommet de dirigeants européens et américains, de rétorsions économiques contre la Russie qui s’accumulent et puis de courage étonnant des Ukrainiens devant la haine, la dévastation et la mort, qui les encerclent et leur résistance face aux soldats russes. « La peur au ventre, la société [ukrainienne] se mobilise […] La résistance est vive » peut-on lire ici et là dans la presse. Hier ce sont 35 tués dont un journaliste américain ici. Et là d’autres morts et blessés. L’aide internationale pour des denrées de première nécessité se fait un chemin à l’est. Et les photos de ruines, de bâtiments en partie soufflés, de soldats russes morts dans les rues et de cohortes de réfugiés( on parle de quelque 135 000) fuyant vers l’ouest,  des femmes surtout, portant parfois des enfants dans les bras et de maigres bagages avec tout ce qu’ils ont pu emporter tandis qu’on apprend qu’une maternité a été bombardée, une petite fille tuée…  Et puis ceux qui restent terrés dans des caves, parfois trop vieux pour prendre la route ou participant à la résistance armée. Dans une lettre qui « s’adressait aux fidèles et citoyens d’Ukraine », le 24 février, le métropolite orthodoxe de Kiev et de toute l’Ukraine (une Église orthodoxe rattachée au patriarcat de Moscou) écrivait : « Il est très regrettable que la Russie ait initié des actions militaires contre l’Ukraine et je vous supplie de ne pas paniquer, d’être courageux et de manifester votre amour pour votre terre et pour chacun. » Et il en appelait directement au président Poutine pour cesser immédiatement cette « guerre fratricide » La guerre entre ces deux peuples est une répétition du péché de Caïn qui a tué son propre frère par envie. Une telle guerre n’a pas d’excuse, ni au regard de Dieu, ni du peuple ». Et le métropolite Onuphry de Kiev et de toute l’Ukraine lançait un appel au dialogue en espérant que la « paix de Dieu se répande sur notre terre et sur le monde ». Si je cite cette lettre du patriarche ukrainien d’une Église rattachée au patriarcat orthodoxe de Moscou, c’est en contraste avec la lettre du patriarche Kirill de Moscou et de toute la Russie répondant au Conseil œcuménique des Églises (COE), dont son Église est membre depuis 1961, qui lui demandait de « faire entendre sa voix afin que la guerre s’arrête. »  La réponse de Kirill se trouve sur le site du COE , en voici des extraits : « Comme vous le savez, ce conflit n’a pas commencé aujourd’hui. Je suis fermement convaincu que ses initiateurs ne sont pas les peuples de la Russie et de l’Ukraine, qui sont issus des fonts baptismaux de Kiev, sont unis par une foi commune, des saints et des prières communs et partagent un destin historique commun. Les origines de la confrontation résident dans les relations entre l’Occident et la Russie. Dans les années 1990, on avait promis à la Russie que sa sécurité et sa dignité seraient respectées. Cependant, au fil du temps, les forces qui considéraient ouvertement la Russie comme leur ennemi se sont approchées de ses frontières. Année après année, mois après mois, les États membres de l’OTAN ont renforcé leur présence militaire, sans tenir compte des craintes de la Russie que ces armes ne soient un jour utilisées contre elle. De plus, les forces politiques qui se donnent pour objectif de contenir la Russie n’allaient pas la combattre elles-mêmes. Ils prévoyaient d’utiliser d’autres moyens, ayant tenté de faire des peuples frères – Russes et Ukrainiens – des ennemis. Ils n’ont épargné aucun effort, aucun argent pour inonder l’Ukraine d’armes et d’instructeurs de guerre. Pourtant, la chose la plus terrible n’est pas les armes, mais la tentative de « rééduquer », de transformer mentalement les Ukrainiens et les Russes vivant en Ukraine en ennemis de la Russie. Le schisme de l’église créé par le patriarche Bartholomée de Constantinople en 2018 a poursuivi le même objectif. Il a fait des ravages sur l’Église orthodoxe ukrainienne [en reconnaissant l’indépendance de  l’Église orthodoxe ukrainienne qui dépendait auparavant du patriarcat de Moscou]. Le patriarche Kirill relit les récents événements comme ceux des dernières années (la révolte de Maïdan, la guerre du Donbass) à « une stratégie géopolitique à grande échelle [du monde occidental] d’affaiblir la Russie. Et maintenant, les dirigeants occidentaux imposent de telles sanctions économiques à la Russie qui seront préjudiciables à tout le monde. Ils rendent leurs intentions flagrantes – apporter des souffrances non seulement aux dirigeants politiques ou militaires russes, mais spécifiquement au peuple russe. La russophobie se répand dans le monde occidental à un rythme sans précédent. » Et pour finir, Kirill exprime tout son espoir « que le Conseil œcuménique des Églises pourra rester une plate-forme de dialogue impartial, libre de préférences politiques et d’approche unilatérale. » Une parfaite fin de non-recevoir à la demande d’être un médiateur…

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Son soutien à la guerre a valu des reproches au chef de l’Église orthodoxe russe de la part de représentants d’Églises chrétiennes et sur « l’importance de sa responsabilité dans ce conflit. » Le Monde du 12 mars raconte que le président de la Conférence des évêques et le président de la Fédération protestante de France étaient convenus de remettre ensemble la lettre que chacun d’eux avaient écrite au patriarche Kirill. Cela devait avoir lieu à la nouvelle cathédrale orthodoxe russe de Paris, mais le prêtre du lieu ne s’est pas présenté au rendez-vous pourtant convenu. « Il faut l’aider [Kirill] à remplir le rôle historique qui doit être le sien, l’inviter à remplir son rôle d’évêque du Christ qui est de préparer la paix.  La démarche était motivée, explique Le Monde, par le fait que depuis l’invasion russe en Ukraine le patriarche s’est illustré par des sermons mêlant religion et politique, dans lesquels il soutient sans nuance l’offensive militaire de Moscou. » Des prêches où il accuse pêle-mêle des « voisins mal intentionnés qui cherchent à diviser Russes, Ukrainiens et Biélorusses […] et sont contre nos racines spirituelles ». Il dénonçait aussi dans le Donbass, « ceux qui prétendent au pouvoir mondial dont le symbole est selon lui, la Gay Pride… Et le président de la Fédération protestante de France de rêver à une « déclaration conjointe du Vatican et du Conseil œcuménique des Églises (341) »

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Le mensuel Le Monde des religions  a publié, un article paru le 11 mars, pour tenter d’expliquer pourquoi « l’Ukraine catalyse une crise au sein du monde orthodoxe entre Moscou et Constantinople ».  La guerre menée par la Russie en Ukraine est aussi religieuse, affirme l’auteur de l’article : « Ce conflit oppose le patriarche de Moscou, devenu idéologue de l’impérialisme du Kremlin, à une Église orthodoxe d’Ukraine qui s’est émancipée de la tutelle russe en 2019. »

L’Église orthodoxe de Kiev a été la toute première à être évangélisée, en 988 : elle constitue l’Église chrétienne originelle en terre slave. » Des Églises orthodoxes locales seront reconnues indépendantes au 16e siècle par Constantinople mais l’Église orthodoxe de Moscou devenue puissante dans un empire puissant qui entend intégrer l’ensemble du monde orthodoxe absorbe le territoire ukrainien et jusqu’au 20e siècle le métropolite de Kiev sera dépendant de Moscou.

Jusqu’en 2019, où l’Église orthodoxe d’Ukraine est reconnue comme autocéphale, c’est-à-dire indépendante, ce que le patriarche de Moscou avait toujours refusé. Cette reconnaissance de l’autocéphalie de l’Église orthodoxe d’Ukraine par Bartholomée de Constantinople, primus inter pares de l’orthodoxie, est intervenue après l’annexion de la Crimée en 2014 puis l’occupation russe du Donbass, tout deux territoires ukrainiens. La situation ukrainienne l’a incité à intervenir en libérant l’Église orthodoxe d’Ukraine de son allégeance à Moscou mais « a provoqué un schisme d’ampleur mondiale dans l’orthodoxie entre l’Église la plus légitime de l’orthodoxie mondiale, Constantinople et l’Eglise la plus puissante, Moscou. L’Ukraine est donc le catalyseur d’une crise de gouvernance au sein du monde orthodoxe, d’autant que cette Eglise orthodoxe est désormais la deuxième plus importante après celle de Moscou. » Aujourd’hui, il existe deux Églises orthodoxes en Ukraine, celle désormais autocéphale et celle qui dépend encore du patriarcat de Moscou. Le patriarche de Moscou, Kirill, a prononcé une homélie très remarquée le 27 février en qualifiant de « forces du mal » ceux qui « ont toujours combattu l’unité de la Russie et celle de l’Église russe », autrement dit les Ukrainiens s’opposant aux desseins de Vladimir Poutine. Dans ce contexte de crise du monde orthodoxe, comment comprendre cette prise de position ?  « Dans la sémantique du patriarche de Moscou, l’invasion de l’Ukraine devient une défense face à un empire du mal. » Un « empire du mal » qui semble aller croissant : ainsi, pour ne citer que deux exemples : le métropolite Filaret de Lviv et Halych ou le père Olchanky d’un monastère de Lviv qui réclament, comme le métropolite Filaret « une église autocéphale indépendante de Moscou » ou comme le père Olchansky « une rupture définitive avec l’Église russe » justifiée par le fait que le patriarche Kirill de Moscou n’a pas condamné l’invasion de l’Ukraine et le désastre qui s’ensuit.

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