La fin de ma méritocratie

22avr12h5513h00La fin de ma méritocratie12h55 - 13h00 AnimateurGueno Jean-PierreÉmissionInstants d’Histoire

Résumé de l'émission

La fin de ma méritocratie.

Le mot méritocratie établit un lien direct entre mérite et pouvoir. Lorsque ce lien est brisé, le pouvoir devient indigne et frappe d’indignité ceux qu’il habilite. Longtemps la gouvernance des grands établissements culturels et des grandes entreprises sous influence d’Etat a été accordée à des personnalités qui avaient prouvé leurs compétences par leur passé culturel et ou par leurs aptitudes à manager de grandes entreprises.

Ces institutions peuvent avoir tendance à se transformer en voies de garages pour ministres déchus en quête d’un lot de consolation prestigieux concédé par le président de la République. Ainsi la RATP pour un ancien premier ministre ou le château de Versailles pour un ancien ministre de l’Education Nationale. Ces parachutages sont le fait du prince. Ils ont l’hypocrisie de s’effectuer sous l’ombrelle et avec la caution de cabinets de recrutement. Ils aboutissent à un dévoiement des pratiques républicaines. On substitue la méritocratie courtisane à la méritocratie républicaine.

On ne respecte dans ce genre d’histoire ni l’entreprise ou l’institution, ni ses personnels, ni ses visiteurs ou ses clients. On ne respecte pas le ou la parachuté(e)-bombardé(e)- elle-même ou lui-même, et ce piètre exemple vient du sommet de l’Etat. Le fait du prince annihile le beau concept du mérite républicain. Le courtisan reçoit sa charge qui le récompense de ses services passés et lui fait avaler sa déchéance. Il va pouvoir trôner sur ce qui a été transformé en fief sans avoir à réaffronter les aléas de l’élection et de la politique. En nommant son responsable, le président renforce son emprise sur des entreprises ou sur des institutions qui auraient gagné à garder leur part d’indépendance mais qui vont lui être asservies. Quelles aient été de service public ou qu’elles le soient encore, ces institutions et ces entreprises ne sont plus au service de tous.

Beaucoup ont été privatisées ; celle qui ne le sont pas encore sont en voie de privatisation rampante après avoir été colonisées par les princes de la République qui renouent avec certaines mauvaises pratiques de l’ancien régime. Les apôtres de ces pratiques d’asservissement ou de privatisations d’entreprises de bien et de service public devraient être accusés d’abus de bien social. En privilégiant les courtisans aux méritants et aux compétents, ils polluent les secteurs des services publics de la fourniture d’eau et d’énergie, de culture, de santé et d’éducation qui finissent par desservir l’intérêt général au profit d’intérêts particuliers. Et lorsqu’ils se proclament princes de la République, leur « bon vouloir » les éloigne du bon pouvoir.

Jean-Pierre Guéno