Descartes et Pascal

05fév12h5513h00Descartes et Pascal12h55 - 13h00(GMT+01:00) AnimateurGueno Jean-PierreÉmissionLe souffle du Diable et le soupir de Dieu

Résumé de l'émission

l’instant de la grâce 10 novembre 1619 23 novembre 1654 L’homme a simultanément tout autant besoin de croire et de savoir. Sa foi le place sur le terrain du cœur et sur celui des sciences dites humaines. Ses connaissances sur celui de la raison et sur celui des sciences dites exactes. Il faut relire à la fois Pascal et Descartes, effeuiller leurs pensées trop souvent l’une et l’autre simplifiées jusqu‘à la caricature. Le rationalisme, le cœur et la foi sont beaucoup plus compatibles et convergents qu’on ne le prétend. C’est sans aucun doute l’humanisme qui les réunit et leurs exigences scientifiques n’ont pas empêché Pascal et Descartes de connaître l’un et l’autre une expérience mystique, l’irruption de la grâce dans leur existence. Chacun a connu sa nuit chargée de lumière : Nous sommes le 10 novembre 1619 ; Descartes à 23 ans.Il s’est engagé en Allemagne dans les troupes du duc Maximilien de Bavière. Alors qu’il se trouve dans les environs d’Ulm, il connaît une nuit d’enthousiasme où, après avoir découvert les « fondements d’une science admirable », il fait trois rêves étranges et exaltants, qui l’éclairent sur sa vocation. Il va s’enfermer ensuite dans sa chambre chauffée pour mettre au point sa méthode. Nous sommes le 23 novembre 1654. Pascal à 31 ans. Il commence à réciter une sorte de catéchisme. Des mots préfabriqués : et puis tout explose avec un mot de trois lettres : « Feu ! ». Alors la grâce s’exprime dans des formules fulgurantes : « Grandeur de l’âme humaine. » « Joie, joie, joie, pleurs de joie. ». « Renonciation totale et douce ». Les mots sont incandescents. Pascal les griffonne sur le papier, et puis arrivant à peine à se relire, il recopie sur le champ son premier manuscrit… Pour la première fois de sa vie, il n’est plus la source de la lumière. Il en est le réceptacle. Il vient en fait de renaître. Jusqu’à sa mort, pendant huit ans, il garde son brouillon et son double, cousus dans la doublure de son manteau. Ces deux parchemins sont aujourd’hui conservés parmi les trésors absolus de la Bibliothèque Nationale de France. Ils ont été retrouvés sur son corps inanimé, le 19 août 1662. Dans la chambre du mort, on a aussi retrouvé, éparses, les feuillets manuscrits de ses pensées, dans un désordre qui complique toujours aujourd’hui la mise en forme de leur publication et leur interprétation. C’est parce que nous avons le besoin de douter que nous avons le besoin de vérifier. C’est parce que nous avons le besoin de prouver et d’avoir raison que nous ressentons le besoin de nous tromper. Il y a dans notre esprit un confiance du cœur et une confiance du cerveau. Ces deux confiances cohabitent. Elles nous partagent. Elles nous écartèlent parfois lorsqu’elles ne se rejoignent pas. Chacune d’entre elle est susceptible de nous rendre aveugles. La confiance du cerveau lorsqu’elle est trop rigide. Celle du cœur lorsqu’elle est trop naïve. Notre cœur et notre raison font cohabiter avec notre intelligence, notre instinct, notre intuition, nos émotions. C’est tout cela l’être humain. Un mélange composite qui s’agrège et tire son énergie d’une force à la fois sidérante et sidérale : celle de l’espoir. L’espoir, une arme décisive devant « le silence éternel de ces espaces infinis » qui nous effraye tous.

Réécouter l'émission