La mémoire de la courbe

23oct12h5513h00La mémoire de la courbe12h55 - 13h00(GMT+02:00) AnimateurGueno Jean-PierreÉmissionInstants d’Histoire

Résumé de l'émission

La mémoire de la courbe. Longtemps l’homme a exulté dans l’art de la courbe, parce que ses routes épousaient celles de la vie. La courbe est généreuse. Elle évoque les rondeurs, les cambrures, le galbe du corps de l’amante et la bulle protectrice, le cocon du ventre maternel. Celles du vivant qui englobe. Electrons, atomes, cellules, planètes, étoiles, galaxies, nébuleuses : il n’est que trajectoires, courbes et paraboles dans l’univers. La ligne droite ne caractérise que la chute, l’avarice, la pingrerie des âmes desséchées, la tristesse des regards pauvres. La beauté, la générosité de l’architecture, c’est le triomphe de la courbe, de l’arc, de la voûte, du cintre, de l’ogive, du dôme, de la spirale, splendeurs romanes ou gothiques, explosions printanières de l’art nouveau, évocation de la tige et des lignes sinueuses, quand la pierre retrouve les formes douces et végétales de ses fossiles sous le burin du sculpteur et que le métal épouse les méandres de la rivière sous le marteau du forgeron. Les courbes s’épousent quand les lignes droites se fuient en ne se croisant jamais. Les courbes sont fluides quand les lignes droites sont raides. Les courbes sont organiques quand les lignes droites sont géométriques sans pour autant avoir la forme parfaite du cercle ou de la sphère. Les courbes unissent quand les angles brisent. Les courbures glissent et résistent quand les angles blessent, cassent ou s’ébrèchent. L’ennui doit être rectiligne. Il est simpliste et n’a pas la fantaisie des virages, des détours, des lacets, des chemins de montagne, ou des sentiers de douaniers. La routine et monotonie se font autoroutières quand l’aventure et la joie se font routes départementales. L’art de la ligne droite, c’est celui de la grille, du cube, de la cage ou du clapier, de l’immeuble de verre ou de béton. Il faut savoir retrouver la souplesse confortable du lien de la courbe. Celle du hamac, de l’oreiller, de la couette ou de l’édredon. Celle qui ménage des détours à l’existence et qui semble freiner la chute et les tic-tac du temps comme le font les balanciers oscillants des montres et les balanciers à mouvement des horloges.

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