La mémoire de Marianne

14jan12h5513h00La mémoire de Marianne12h55 - 13h00 AnimateurGueno Jean-PierreÉmissionInstants d’Histoire

Résumé de l'émission

La mémoire de Marianne

A côté de la Photographie officielle, le choix du timbre courant est à la fois une affaire d’Etat et une affaire présidentielle. En 1942 et en 1945, Charles de Gaulle préempte deux Marianne guerrières en bonnet Phrygien, deux vraies Républiques qui tranchent avec l’effigie de Pétain. Les Marianne qui suivent sont plus apaisées. Après avoir gagné la guerre il faut bâtir la paix, reconstruire, prospérer. La tête de Marianne est un peu celle de la figure de Proue de la nef des 30 glorieuses. La Marianne de Pompidou s’efface quant à elle devant la valeur du timbre. Elle est utilitaire. Celle de Giscard devient Sabine ; elle se veut symbole de la réconciliation nationale Gauche/Droite. Sur les timbres courants « France » remplace « République Française ». En 1982, Mitterrand renoue avec Marianne et avec le vocable République Française. Cette première Marianne générée par l’homme à la rose regarde vers la gauche. Le visage de sa deuxième Marianne de 1990, celle du bicentenaire de la révolution française, ressemble à celui de son épouse. Pour la première fois Marianne regarde les français de face. En 1997, la première Marianne choisie par Jacques Chirac prend un coup de jeune. C’est la première Marianne dessinée par une femme, Eve Luquet. Elle porte à la fois la devise de la République et les étoiles de l’Europe. Le mot France revient sur les timbres courants avec la seconde Marianne de Chirac qui est très écologique et qui est le résultat d’un concours organisé par la Poste en 2004 : Marianne se mobilise pour l’environnement. La Marianne de Nicolas Sarkozy choisie par ses soins en 2008 est en phase avec son portrait officiel. Elle marie le bonnet phrygien de la République avec les étoiles de l’Europe. Son apparition coïncide avec le début de la présidence de l’union européenne par la France. En 2013, François Hollande dévoile une Marianne jeune, cheveux bouclés au vent. Dessinée de face, la main de la jeune femme figure également sur le timbre. Mais cette Marianne de la jeunesse créée vite la polémique : l’un des deux co-créateurs du timbre affirme que le portrait a été inspiré par Inna Shevchenko, la fondatrice des Femen.

En 2018, la Marianne d’Emmanuel Macron a été réalisée par l’artiste Yseult Digan, digne prêtresse du street art, surnommée « YZ ». Ce portrait montre une Marianne jeune, de profil, aux longs cheveux bouclés et aux yeux maquillés. « Je voulais que cette Marianne soit forte, fière et volontaire, avec un regard franc qui porte vers l’avenir », a expliqué la dessinatrice. Surnommée « Marianne l’engagée » par Emmanuel Macron, cette Marianne représente « le nouveau visage de la République, une bataille de chaque jour. »

A chaque président sa Marianne. On chuchote aujourd’hui que   la future Marianne, le seconde du règne d’Emmanuel Macron,  pourrait être virtuelle – et “un peu” transgenre. Elle pourrait être le fruit de « l’intelligence artificielle », pour ne pas dire d’un algorithme.

Jusqu’alors, Marianne prenait pour modèle une seule et unique femme, en chair et en os, anonyme ou célèbre, de Brigitte Bardot à Evelyne Thomas en passant par Catherine Deneuve, Michèle Morgan ou encore Lætitia Casta. L’inclusivité façon 2022 commandrait désormais la création d’une femme qui n’existe pas mais qui les rassemblerait toutes, au sens propre. La société fluide à son paroxysme.

« On a déjà récolté plusieurs milliers de portraits de femmes et vers le mois de mai, on utilisera un algorithme pour produire plusieurs représentations de femmes qui en réalité n’existent pas. Ensuite on en sélectionnera cinq ou six qu’on soumettra au vote des participantes », indique le cofondateur du collectif artistique Obvious qui semble sur le pont.

« Toutes les personnes qui se sentent femmes peuvent participer » avait indiqué Marlène Sciappa. Mais ne sont-elles pas trop genrées ?

Réécouter l'émission