La mémoire des doux fantômes

13fév12h5513h00La mémoire des doux fantômes12h55 - 13h00 AnimateurGueno Jean-PierreÉmissionLe souffle du Diable et le soupir de Dieu

Résumé de l'émission

Après l’année 2020, calamiteuse à souhait, le temps de la nativité et celui de l’an neuf ne nous ont pas seulement rappelé la durée et la distance qui nous séparent de ceux qui nous sont chers, de nos aînés comme de nos petits-enfants, surtout lorsque la pandémie projette leurs visages et leurs voix sur les écrans théoriquement froids et muets de nos smartphones et de nos ordinateurs. Ils n’ont pas seulement évoqué trois rois venus du bout du monde, Gaspard, Melchior et Balthazar, de cultures et de couleurs de peau différentes, qui ont tout abandonné, qui sont redevenus humbles, et qui ont suivi l’étoile du berger pour rappeler aux humains que leur puissance n’est rien, comparée à celle de l’enfance et de l’innocence. Le temps du renouveau nous rappelle le visage de ceux que nous avons perdus, le reflet de leurs regards que nous croyons parfois entrevoir dans celui des boules de verre soufflé de nos arbres de Noël. Ils sont là ces doux fantômes. Endormis dans nos pensées. Nous croyons retrouver au début de l’hiver le son caractéristique et si porteur de réminiscences de leurs pas qui s’enfonçaient dans l’océan muet du silence de la neige. Alors au-delà des chants de Noël surgis de nos enfances il nous semble les entendre, nos doux fantômes, murmurer l’ode à la joie, ce poème de Schiller transformé en hymne par Beethoven. Et ces notes résonnent dans nos âmes, tissées d’espoir et de nostalgie.

Joie, belle étincelle divine,

Tous les humains deviennent frères,

lorsque se déploie ton aile douce.

Un autre chant surgit. Celui de la musique du film de Steven Spielberg La liste de Schindler écrit en 1993 par le compositeur John Williams. Un hymne à la tristesse. Et les deux partitions se mélangent. L’une qui a su mettre en musique les mots d’un poète, l’autre sans paroles. Et nous ne savons plus si nos lèvres doivent exprimer la grâce du sourire ou la grimace des larmes. Une alternance de désespoir et d’allégresse. La glace de nos cœurs endurcis se met à fondre comme celui du petit Kay évoqué par Andersen dans Le Palais de la Reine des Neiges. Le diable a fabriqué un miroir maléfique qui salit tout ce qu’il reflète. Le miroir se casse et deux des morceaux ensorcelés se coincent dans l’œil et dans le cœur de Kay, le rendant dur et indifférent à tous les malheurs du monde. Et puis les larmes et le chant de la petite Gerda « Les roses fleurissent et se fanent. Mais bientôt nous reverrons la Noël et l’Enfant Jésus » vont faire fondre la glace et évacuer avec elle l’éclat de verre niché dans le cœur de Kay.

Ils ont déserté la vie les doux fantômes de nos souvenirs. Mais ce sont eux qui nous rendent humains en nous rappelant au temps de la nativité et à celui de l’an neuf que nous ne sommes que des migrants de passage. Avec eux, il n’y a pas de gestes barrière, il n’y a pas de réunions interdites. Il n’y a que les mots d’amour chantés par Véronique Sanson

D’où vient ce sentiment bizarre que je suis seul
Parmi tous ces amis et ces gens qui ne veulent
Que quelques mots d’amour

Envoyons-nous « comme un papillon à une étoile, ces quelques mots d’amour ».

Pour une année 2021 plus sereine, et transcendée par le bon vaccin.

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